Vous savez d'avance ce que propose un socialiste. C'est un changement social complet, c'est le collectivisme, l'appropriation de la terre et des instruments par tous ceux qui travaillent. C'est ainsi que le gouffre de haine pourra se combler entre les hommes, que la misère et la poursuite de la fortune, cette grande conseillère de crimes, cesseront d'exciter les citoyens les uns contre les autres, et que la vindicte sociale pourra se reposer enfin. Au droit de la force, qui prévaut dans la nature sauvage, il est temps de faire succéder la justice, qui est l'idéal de tout homme digne de ce nom.
Mais dans la société transformée, il est possible qu'il y ait encore des crimes. Physiologiquement le type du criminel pourra se présenter de nouveau. Que ferons alors ? Tuerons-nous le criminel ? Non certes. Celui chez lequel le crime provient de la folie, nous le soignerons, comme nous soignons les fous ou les autres malades, en nous garant de leurs violences. Quant aux hommes devenus criminels par la fougue du tempérament ou l'ardeur du sang, il serait dès maintenant possible de leur proposer la réhabilitation par l'héroïsme.
On l'a vu cent fois: des galériens se jettent dans les flammes ou dans les eaux pour sauver des malheureux et se sentir renaître ainsi dans l'estime des autres hommes. Les forçats que la commune de Carthagène rendit libres et que la France a refait esclaves, ont été sublimes d'héroïsme pendant leur courte liberté de quelques mois. Obéissez, disait le Christianisme, et le peuple s'est avili. Enrichissez-vous, disent les bourgeois à leurs fils, et ceux-ci cherchent à s'enrichir de toutes les manières, soit en violant, soit avec plus d'habileté, en tournant la loi. Devenez des héros, disent les socialistes révolutionnaires et des brigands même pourront se relever par l'héroïsme.
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