C'est une lettere que Proudhon a écrit à un autre socailiste avec qu'il voudrait travailler.
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M. de Girardin1
Sainte-Pélage, 10 novembre 1840.
Monsieur, je viens de lire vos Cinquante-deux; inutile de vous dire que je vous comprends à merveille. NOUS SOMMES, VOUS ET MOI, LES DEUX POLEDS DE LA RÈVOLUTION; il ne tiendra qu'à vous que d'ici à six mois nous ayons bousculé tout ce vieux monde.
Je me propose de rendre compte incessamment de votre systéme dans la Voie du Peuple. Je le ferai au point de vue de mes idées favorties ou plutôt de mes inclinations antigouvernementales; c'est par là que nous diff&eacure;rons surtout l'un de l'autre, et que notres discussion, si vous le voulez, pourra devenir intéressante. Je signalerai dans votre travail quelques parties qui me semblent défectueuses. Vous les expliquerez ou les modifierez: ceci est la moindre chose. Mais le point capital sur lequel porters ma critique, c'est que, selon moi, vous attaquez beaucoup trop vivement la propriété, et que vous tendez à votre insu à réglementer tout par l'Etat; EN SORTE QUE VOUS éTES ENCORE PLUS SOCIALISTE QUE JE NE SUIS, chose dont je ne suis pas jaloux, assuément, mais que je trouve fort périlleuse pour votre projet.
L'appréciation que je ferai de votre plan ne pourra, du reste, vous faire tort. Dieu merci! Vous ne serez jamais suspect de communisme, et vous aurez tout profit à mes observations, soit pour votre popularité soit vis-à-cis de la bourgeoisie, qui vous saura gré de l'avoir rassurée.
Quant à moi, le rôle auissi odieux qu'absurde que je joue depuis dix-huit mois ne me permet pas de me priver de l'appui que m'offre spontanément un homme tel que M. de Girardin. Il y a longtemps que je cherche un homme sur qui je puisse me décharger de la réputation de premier révolutionnaire de l'époque; cet homme-là, ce sera vous. Prenez vos mesures en conséquence. Quand la Presse fera la besogne de la Révolution et la Voix du Peuple celle de la Conservation, peut-être qu'enfin le pays, émerveillé, édifié, aura confiance en lui-mêmeme et marchera de l'avant. Ayez seulement le courage, en défendant votre système, d'en avouer toute la portée et les conséquences, et je rois pouvoir vous dire que bientôt on ne parlera plus en France que de vous.
Agréez, Monsieur, mes salutations amicales.
P.-J. PROUDHON.
1. Proudhon, P.-J (1875).Correspondance de P.-J. Proudhon, Tome Troisiéme pp. 59-60. Librarairie Internationale, Paris.
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