Letters from: Proudhon, P-J. (1875) Correspondance de P.-J. Proudhon; Tome Troisiéme Librairie Internationale; Paris.
De P.-J. Proudhon
A MM. Darimon et Charles Edmond
29 février 1850
Mes chers amis, vous êtes des enfants, pour ne pas dire des automates. Quand je vous indique une idée à suivre, vous la jetez dans votre journal comme un paquet dorties. Si je dis que le Pouvoir est engagé dans une politique de trahison, vous vous mettez à crier, seuls dans la presse : Trahison ! je vous recommande de réchauffer le patriotisme du peuple et déveiller la méfiance des masses, et vous faites une paraphrase à la crème fouettée sur une demande dinterpellation de Mauguin et une interruption de Jules Favre. Vous vous attirez des procès sans but, sans résultat, sans motif, sans cause. Et vous me dites que vous ne faites que suivre mes inspirations ! Un tuyau dorgue ne ferait ni moins ni plus.
Il faut racheter cette étourderie avec un peu dhabileté.
Insistez demain, mais froidement, sur limminence dune guerre générale ; résumez les motifs de crainte ; que Charles Edmond y ajoute, en entrefilet, lhistoire du Capitole et des 50 millions de la Russie ; rappelez les outrages de la réaction, laveu fait par un de ses organes : plutôt les cosaques que les républicains. Dites que M. Lahitte a reconnu lui-même que lajournement à un mois était dérisoire ; quavec des Denjoy, des Parieu, des Ségur dAguesseau, il y a tout à craindre ; citez les nouvelles des journaux italiens concernant le général Baraguey dHilliers, etc., etc.
En un mot, justifiez-vous devant lopinion ; en attendant que vous puissiez vous justifier devant le jury.
Nous voilà avec trois procès, nous en aurons pour 24,000 francs damende, que le citoyen Proudhon remboursera à M. H*** sur ses appointements de ministre des finances de la République démocratique et sociale.
Je vous renvoie ma lettre pour que vous la relisiez et me compreniez mieux une autre fois.
Salut cordial.
P.-J. Proudhon
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